LA ROMANCE DE LA MEMOIRE

 

 

Les pas pesants du temps font danser la mémoire, qui chante la romance infinie de la vie.

- prends moi! dit le temps. Prends moi sans te presser, avec douceur je suis tout à toi..

- aurai-je assez de temps, dit la mémoire. Assez de temps pour apprécier la vie qui se retire? Aurai-je assez de temps pour seulement penser un peu? Et si je peux penser, aurai-je assez de temps pour chanter les rêves qui dorment encore en moi?

- cela n'a pas d'importance, dit le temps. Il suffit que tu saches que tu en as.

La mémoire parvint alors à chanter, le temps à passer, les pas à danser, et les rêves se remettent à revivre, à revivre avec le temps.

- dansez! dit la mémoire. Dansez à contretemps si cela vous fait plaisir, mais dansez. ! et les pas de rétorquer :

- si nous dansons à contretemps, il ne sera pas content le temps, peut être nous en voudra t'il?

- cela n'a pas d'importance, dit la mémoire. Pourvu que vous dansiez, cela lui fait une belle jambe qu'il lève à son gré.

- une belle jambe! dirent en chœur les pas. Cela ne se passera pas comme ça! Et il se firent plus pesants.

Le temps eût du mal à passer, les pas traînèrent derrière la mémoire, qui chanta de plus en plus doucement. Et puis s'arrêta de chanter, et se mis à raconter n'importe quoi.

- maintenant elle radote, dit le temps.

Alors les pas se firent plus léger, le temps s'en alla tout doucement ; comme pour ne pas réveiller la mémoire, qui disparaissait avec la vie, en éloignant les pas pesants du temps, qui la faisaient chanter jadis.

La vie partie, il resta tout ce qui avait permis à la mémoire d'exister. Une rose sur le cadran du temps qui refleurit sans cesse exhalant le doux parfum du printemps, un peu de pluie que les soucis offrent avec une espérance sans fin, un peu de vent pour les tempêtes, et tout le déchirement des beaux orages avec leurs fracas démentiels, afin que les calmes puissent être sereins.

Alors le bleu redevient bleu, le vert espère encore, et les blancs continuent de donner à l'innocence la candeur des rêves impossibles.

Il reste alors dans la mémoire, un mot gravé à tout jamais par le temps sur l'autel du passé, que seul l'amour de ceux qui aiment peut rajeunir : « SOUVENIR ».

                                                                 1 Alala